Le terme "impérialiste" a deux sens. Il caractérise la politique d'une puissance qui tend à l'hégémonie et à la conquête, au-delà de son propre territoire national.
Mais il désigne aussi une phase particulière du développement capitaliste que Lénine définit ainsi: "L'impérialisme est le capitalisme arrivé à un stade de développement où s'est affirmée la domination des monopoles et du capital financier; où l'exportation des capitaux a acquis une importance de premier plan; où le partage du monde a commencé entre les trusts internationaux et où, rajoute-t-il, s'est achevé le partage du globe entre les plus grandes puissances capitalistes." Ce qui lui donne comme particularité politique d'être "la réaction sur toute la ligne et le renforcement de l'oppression nationale" (Cf. L'impérialisme stade suprême du capitalisme, Ed. de la Conférence internationale de partis et organisations marxistes-léninistes, p. 103 et 126).
Lorsque nous qualifions cette guerre de "guerre impérialiste", cela signifie d'abord qu'il s'agit d'une guerre de rapine, une guerre d'agression et de conquête de zones d'influence et de marchés, de domination d'autres peuples... où les USA et les pays de la "coalition" sont les pays agresseurs et l'Irak le pays agressé. La résistance armée qu'il oppose à l'avancée des troupes ennemies est légitime, et le fait que les envahisseurs n'aient pas été accueillis en "libérateurs" par les populations, est tout à fait normal. Cette contradiction entre le peuple irakien et l'impérialisme qui veut prendre le contrôle de son pays est exacerbée par la violence des attaques. Pour nous, la dénonciation de cette guerre impérialiste et le soutien à la résistance du peuple irakien, ne peuvent être conditionnés par la nature du régime irakien. Cette question, c’est le peuple irakien qui la tranchera.
Mais la qualification de "guerre impérialiste" ne recouvre pas ce seul aspect. Elle indique également qu'il s'agit d'une guerre intimement liée au stade actuel du capitalisme, l'impérialisme.
Une guerre inhérente au capitalisme de monopole
"Le capitalisme pré-monopoliste, le capitalisme où prédomine la libre concurrence, atteint la limite de son développement entre 1860 et 1880; or... c'est précisément au lendemain de cette période que commence "l'essor" prodigieux des conquêtes coloniales, que la lutte pour le partage territorial du monde devient infiniment âpre. Il est donc hors de doute que le passage du capitalisme à son stade monopoliste, au capital financier, est lié à l'aggravation de la lutte pour le partage du monde." Appliquée à la situation d'aujourd'hui, cette remarque de Lénine écrite au printemps 1916 (idem, p. 91), signifie que la guerre n'est pas seulement une option politique (celle des faucons de l'équipe Bush aux États-Unis, dans le cas actuel ). Elle est impérialiste parce qu'elle s'inscrit dans la logique d'un système: le capitalisme passé au stade monopoliste, dont le moteur, la course au profit maximum, induit la lutte pour le partage et le repartage du monde.
L'expression de la crise aiguë du système impérialiste
"La guerre est la continuation de la politique par d'autres moyens. Cette sentence célèbre appartient à Clausewitz... Les marxistes ont toujours considéré avec juste raison cette thèse comme la base théorique de l'interprétation de chaque guerre donnée." (Lénine 1915, Le socialisme et la guerre in oeuvres complètes, t. 21 p. 314.)
C'est donc à cette aune qu'il faut apprécier la position des différents protagonistes du conflit actuel. La guerre de Bush est la continuation de la politique de l'impérialisme US. Elle prend toutes sortes de formes, qui vont du diktat dans les négociations commerciales internationales jusqu'aux manœuvres de provocation et de déstabilisation de certains États et à la guerre ouverte. Les positionnements respectifs de l'Allemagne, de la France, de la Russie ou de la Chine..., sont l'expression des contradictions qui s'aiguisent entre ces puissances impérialistes et l'impérialisme US, tant sur le plan économique, politique, diplomatique que militaire. La posture de l'impérialisme français, dont Chirac est le porte-parole actuel, traduit le fait que le repartage, basé sur le rapport de force, se fait en sa défaveur. Sa "politique arabe" traditionnelle pour assurer un accès aux matières premières et un débouché aux monopoles français, est en contradiction avec les intérêts de l'impérialisme US et sa politique de contrôle des principales sources d'approvisionnement en pétrole du Japon et de l'Europe. La position du régime irakien, celle de la bourgeoisie irakienne, et le soutien relatif que leur apporte la bourgeoisie d'autres pays (Syrie...), la position de la Turquie..., sont l'expression pour leur part des contradictions qui s'aiguisent entre les États-Unis et les pays du Moyen-Orient... (Cf. Rapport politique, 5e congrès du PCOF, p. 9, 11 et 20.)
Pas de moralisation possible
L'impérialisme porte à leurs limites extrêmes toutes les contradictions du capitalisme: avec le règne des monopoles et de l'oligarchie financière, le degré d'exploitation des classes laborieuses (la contradiction travail/capital) ne cesse de s'intensifier; la concurrence que se livrent entre eux les pays impérialistes et la réalité de leur développement inégal, conduisent inévitablement à des guerres de repartage; le renforcement de l'oppression impérialiste nourrit sa contestation par les peuples. Lénine souligne que "cette aggravation des contradictions est la plus puissante force motrice de la période de transition qui fut inaugurée par la victoire définitive du capital financier mondial." (L'impérialisme stade suprême du capitalisme, Ibid. p. 140.)
Cela signifie pour les marxistes-léninistes que l'hypothèse "d'un redressement réformiste des bases de l'impérialisme est une duperie" (Ibid. p. 125). Il n'y a pas de possibilité de moraliser ce système, de le rendre "pacifique" et il est parfaitement illusoire de croire ou de faire croire à la réhabilitation des institutions bourgeoises internationales (telles la SDN hier, l'ONU aujourd'hui) pour gagner la paix.
Dans le manifeste que Lénine rédigea en 1915 pour servir de base à la Conférence de Zimmerwald, il indiquait en parlant du pacifisme bourgeois et petit-bourgeois: "Nous nous distinguons, en ce sens que nous comprenons le lien inévitable qui rattache les guerres à la lutte des classes à l'intérieur du pays, que nous comprenons qu'il est impossible de supprimer les guerres sans supprimer les classes et sans instaurer le socialisme; et aussi en ce sens que nous reconnaissons parfaitement la légitimité, le caractère progressiste et la nécessité des guerres civiles, c'est-à-dire des guerre de la classe opprimée contre celle qui l'opprime, des esclaves contre les propriétaires d'esclaves, des paysans serfs contre les seigneurs terriens, des ouvriers salariés contre la bourgeoisie."
Définir la guerre actuelle comme une guerre impérialiste inscrite dans le vaste processus de repartage du monde, initié au début des années 1990, c'est mettre le doigt sur la réalité incontestable de ses véritables motifs. Mais c'est aussi mettre le doigt sur la nature du système impérialiste: "Un système parasitaire où les dépenses militaires improductives prennent une place de plus en plus grande, un système réactionnaire où les alliances entre puissances impérialistes ne sont que des trêves entre les guerres" comme le soulignent les conclusions du rapport politique adopté au 5e congrès du PCOF, en novembre 2002. C'est pourquoi notre parti inscrit son mot d'ordre central pour la période -"Tous ensemble contre l'impérialisme, sa politique de guerre et de misère"- dans cette perspective révolutionnaire et appelle à se battre et à s'organiser dans l’objectif d’un renversement du système impérialiste.
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